Le petit-fils du sorcier
Tome III – Les voies parallèles
Pâquerette Béland
Fondation littéraire Fleur de Lys,
Lévis, Québec, 2019, 152 pages.
ISBN 978-2-89612-574-6
Couverture souple couleur
Format 6 X 9 pouces
Reliure allemande
Exemplaire papier : 24.95$ (Canada)
Exemplaire numérique : 7.00$ (Partout)
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PRÉSENTATION
PRÉSENTATION
— Où sommes-nous ?
— Sur le chemin de Travers, répondit le père Antoine.
— Quoi ! Le chemin de Travers ?
— Vous devrez toujours conserver ce bâton pour ne pas vous égarer sur d’autres voies parallèles. Quand vous reviendrez, il vous ouvrira le passage vers la conformité du monde. Continuons ! Nous serons bientôt chez Sage, en Travers. Il espère votre venue depuis de longs mois. J’ai déjà trop tardé à vous y conduire.
Un Sage m’attend en Travers ! Qu’est-ce que c’est que cette histoire ?
* * *
Alban le découvrira et toute sa vie en sera transformée.
Comment ? Vous le saurez, vous aussi, en suivant ses aventures sur Les Voies parallèles.
EXTRAIT
EXTRAIT
Notes
Aspect historique
Ce livre est une fiction et non un ouvrage historique. Tous les noms, personnages, institutions, sites et évènements relèvent de l’imaginaire, y compris les faits relatés en rapport avec les Congrégations religieuses. Toute ressemblance serait pure coïncidence.
Aspect linguistique de l’époque
Mis à part quelques personnages caractérisés par la graphie de leur langage, j’ai choisi de respecter l’enseignement de mon institutrice de première année, mademoiselle Desjardins, qui nous répétait : « Le français, ça ne s’écrit pas comme ça se prononce. »
J’ai aussi utilisé des mots du terroir qui décrivent des réalités spécifiques au Québec du XIXe siècle et parfois encore à celui d’aujourd’hui.
PREMIÈRE PARTIE – TRAVERS
CHAPITRE 1 – Quelle sorte d’instruction ?
Alban avait suivi le père Antoine à travers une dense forêt de conifères.
Au détour d’un sentier, une cambuse occupait le centre d’une sapinière. Un homme d’une trentaine d’années était assis sur un banc de quêteux accoté sur le mur d’en avant. Il expulsait la fumée de sa pipe en fines volutes. Il n’effectua aucun geste signifiant qu’il avait aperçu ses visiteurs. Il se contenta d’émettre :
— Bonjour Alban ! Je t’attendais. Bienvenue dans le Travers du monde. Antoine, je vous remercie. Vous êtes toujours aussi efficace.
— Le plaisir est pour moi, Sage, répondit Antoine. Alban, je vous laisse entre bonnes mains. Au revoir, mes amis.
Il contourna un arbre et disparut.
— Père Antoine ! l’appela Alban, inquiété par ce départ instantané.
— Tu le reverras, intervint Sage. Il voyage continuellement en Travers. C’est sa force.
En Travers ?
Alban avança vers la cabane. L’homme vint vers lui et le poussa. Alban se retrouva sur le dos, le pied de Sage sur l’estomac. Il n’avait rien vu venir.
— Pas méfiant.
L’homme lui tendit la main pour l’aider à se relever. Alban la saisit. Il bascula. Encore sur le dos.
Ayoille ! Quel rustre !
« Pis, pas de comprenure. Ça commence bien ! »
Sage lui tourna le dos et reprit sa pipe. Frustré, Alban se remit sur pied comme un boxeur.
— Si vous voulez vous battre, je suis prêt.
Son adversaire bougea à peine la jambe. Alban perdit son ballant et recula de quelques pieds. Quand il recouvra son équilibre, Sage, pipe en main, semblait complètement indifférent à sa présence.
« Je m’en vais, énonça Alban. Je n’ai rien à faire icitte. » Il reprit son bâton et se dirigea vers l’endroit de son arrivée.
— Pissou.
Il se retourna en grinçant des dents :
— Je ne suis pas un pissou !
— Montre-le.
Il laissa tomber son bâton, hurla en s’élançant vers Sage et buta contre la cabane. L’homme le saisit par le collet et le repoussa contre le mur.
— Juste ça ! ironisa le Sage.
Alban essuya du revers de la manche le sang qui coulait d’une narine. Ce qui amplifia sa rage.
— Vous n’êtes qu’un malvat. Je vous aurai.
Il fit mine d’avancer, tout en reculant, et répéta son manège plusieurs fois dans le but de distraire son adversaire; puis, brusquement, il plongea pour lui agripper les jambes. Il avait appris ces mouvements pendant ses cours de sport.
Il n’attrapa rien. Tout au plus un peu de terre au visage et sur les mains en rasant le sol.
— Pas très convaincant. L’homme se rassit sur son banc. « Va puiser de l’eau à côté pour te laver, lui conseilla-t-il. Le frère Nicolas n’approuve pas que l’on déguste ses plats les mains sales. »
— Le frère Nicolas ! Pourquoi parle-t-il de lui ? Il est à l’Abbaye, pas icitte, attesta-t-il.
Sage resta silencieux.
À reculons, Alban atteignit le puits; il tira une chaudière d’eau et en but une bonne rasade avant de se débarbouiller.
— Viens, ordonna Sage.
Hésitant, il se tint sur ses gardes pour le suivre.
Le nouveau maître s’assit devant une petite table en bois et se concentra. Deux bols de l’Abbaye apparurent sous les yeux écarquillés d’Alban.
— Comment avez-vous fait ?
— Mange.
Ils contenaient du ragoût de bœuf cuisiné par le frère Nicolas.
C’est pour ça qu’il a parlé de lui…
Une fois vide, le bol de l’homme disparut.
C’est impossible, essaya de se convaincre Alban.
Sous le choc, il regarda le sien encore au tiers; son appétit n’était pas au rendez-vous. Plutôt que de perdre ce qui restait, il se hâta de l’achever.
— Maintenant que tu as terminé, renvoie-le au frère Nicolas, lui recommanda Sage.
— Le renvoyer ?
— Oui. À la cuisine de l’Abbaye. Pour qu’il soit nettoyé.
— Je ne sais pas faire ça. Et puis, si je ne l’avais pas vu disparaître, je n’y aurais pas cru.
— Impotent en plus. Je dois donc tout te montrer ? Quelle misère ! D’un mouvement imperceptible du poignet, Sage leva le bol, le promena au-dessus de la table et le reposa. « Prends-le ! »
Craintif, il obéit.
Sage posa les mains sur celles de son apprenti.
— Pense à l’endroit où vont les bols sales.
Ça, il le savait. Il les voyait dans sa tête. Un courant inattendu l’effleura et il perdit sa concentration.
« On recommence », dit patiemment le maître.
La deuxième fois, il laissa le courant magique pénétrer ses mains. En fait, c’était plus agréable qu’effrayant.
« Vas-y ! Dépose-le. »
Ses doigts s’agitèrent. Il échappa le bol.
Ouf ! souffla-t-il intérieurement.
« C’est un début. »
Le bol disparut. À la place, une théière remplie d’une mixture noire dégageait une odeur âcre. Le Sage en versa dans des tasses venues de nulle part.
Encore une apparition !
— Bois.
Les battements de son cœur l’assourdissaient. C’est un vrai sorcier, cet homme ! Dire que je n’y croyais pas ! Il prit le temps de se calmer. Et si c’était empoisonné ? Non, il a déjà bu sa tasse, se répondit-il. Il évita de humer les vapeurs pour en avaler une gorgée. C’était moins infect que ça paraissait.
— Ton instruction commence dès maintenant.
— Mon instruction ? Avant le repas, ce n’était pas commencé ? ironisa-t-il.
— Non.
— Quelle sorte d’instruction ?
Les pattes de son banc s’écartèrent. Il se retrouva assis à terre. Et il s’était cogné la mâchoire en tombant.
Vingueu !
— Suis-moi, ordonna-t-il.
Le temps de le rejoindre à l’extérieur, le toit de la chaumière s’écroulait.
Qu’est-ce qui… Les débris s’amoncelaient quand il se retourna.
— Vous avez détruit la cabane ! Pourquoi ? Comment ?
L’homme, muet, prit son bâton et s’engagea sous les sapins.
Alban avait à peine avancé de trois pas que des racines s’entortillèrent à ses chevilles.
— Déprends-toi.
Il les décrocha en s’éraflant les doigts et tenta de le suivre.
Pendant tout l’après-midi, il s’embourba, s’accrocha, culbuta, chuta dans un trou… À chaque obstacle, il se relevait, la colère décuplée.
Il ne le rejoignit qu’au moment où le jour déclinait. Sage était déjà assis sur son banc et s’amusait à lancer des torsades de fumées. La cambuse qu’il croyait détruite s’élevait derrière lui, intacte. De la viande inconnue cuisait sur un grillage au-dessus d’un feu.
— On n’a pas droit à la cuisine du frère Nicolas, ce soir ?
Plutôt que de répondre à ce sarcasme, l’homme planta une tige de bois dans un morceau.
« J’en ai assez. Je m’en vais », décida Alban. Il chercha son bâton du regard. Il n’était plus à l’endroit où il croyait l’avoir laissé.
— Tu t’en iras quand tu auras réussi à me suivre, répliqua Sage. Mange ! Il lui tendit la viande grillée.
Alban maugréa, vérifia ce sur quoi il allait s’asseoir et mastiqua sans un mot.
« Il y a un lit pour toi au fond de la pièce. Va dormir. »
Il obéit. Mais sans abdiquer.
Demain matin, je décampe.
Ce qu’il n’accomplit pas.
Il passa encore quelques jours étrivants avant de réaliser que s’il s’élevait du sol, il contournerait tous ces stupides obstacles. Comme sa mère quand elle lave les murs !
Et moi, quand je cours. Pourquoi n’y ai-je pas pensé plus tôt ? se disputa-t-il.
— Fin du Chapitre 1 —
AU SUJET DE L’AUTEURE
AU SUJET DE L’AUTEURE
PAQUERETTE BÉLAND
Il y longtemps déjà, Pâquerette est née à Sayabec, un village de la Matapédia. Elle fréquenta l’école des Filles de Jésus où des cours de piano lui permirent de découvrir l’amour de la musique. Quand elle entra au secondaire, une autre passion l’attendait, celle de la littérature. Et c’est celle-ci qui influença son choix d’études collégiales.
À la fin de son Cégep, elle décida d’aller sur le marché du travail, un an ou deux, pour enseigner le piano. Une parenthèse qui se solda dix ans plus tard par un retour à l’Université de Rimouski en études littéraires, suivi d’une maîtrise en Bibliothéconomie, à Montréal.
Cette nouvelle profession lui permit de travailler dans des milieux différents, – Rimouski, Jonquière, St-Hubert – et l’amena aussi à rencontrer plein de gens intéressants, – libraires, éditeurs et bien sûr écrivains. Mais ce fut surtout la présence continuelle des livres autour d’elle et de tous les mondes qu’ils renferment qui déclenchèrent son envie d’écrire. Et comme source d’inspiration, rien de mieux que la vallée qui la vue grandir et les pays qu’elle a visités.
Elle se mit à la tâche en février 2001 et depuis, l’écriture fait partie de son quotidien pour son plus grand plaisir.
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