La laïcité dévoilée – Redécouvrir la laïcité au-delà de la rectitude multiculturaliste, Essai politique, Jacques Savard, Collection Québec, Fondation littéraire Fleur de Lys

La laïcité dévoilée

Redécouvrir la laïcité au-delà de la rectitude multiculturaliste

Jacques Savard


DONNÉES AU CATALOGUE

La laïcité dévoilée
Redécouvrir la laïcité au-delà de la rectitude multiculturaliste
Essai politique
Jacques Savard
Collection Québec
Fondation littéraire Fleur de Lys
Lévis, Québec, 2019
244 pages
ISBN 978-2-89612-562-3


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PRÉSENTATION

Au Québec, la laïcité, sa raison d’être et ses fondements ont très peu fait l’objet de commentaires, malgré les nombreux débats qui prétendaient en débattre. Elle a été tenue pour acquise et noyée dans l’absolutisme allégué de la liberté de religion et de son délire vestimentaire.

Quelles sont les différences et les similitudes de la laïcité républicaine et de sa contrefaçon dite « ouverte » ? Quel objectif social devraient-elles satisfaire ? Comment s’en acquittent-elles ? Sa forme républicaine est-elle véritablement incompatible avec les chartes ? La laïcité dévoilée répond à ces interrogations. L’auteur revoit attentivement les concepts d’intégration, de multiculturalisme et d’interculturalisme dont il propose une nouvelle définition plus générale et plus réaliste. Il passe aussi en revue les conclusions cruciales du jugement de la Cour suprême sur la prière à Saguenay et s’attarde en particulier à sa définition de la neutralité réelle de l’État.

La laïcité dévoilée décrit une politique basée sur un groupe de valeurs fondamentales établissant un lien organique avec la Charte des droits et libertés et ouvrant la porte à une vision sociale de la laïcité.


DÉDICACE

À tous ceux, jeunes et vieux, à qui on n’a jamais sérieusement expliqué la laïcité.


ÉPIGRAPHE

« La laïcité est donc un cadre juridico-politique qui tient à la nécessité de faire vivre ensemble dans la même société des êtres humains différents par leurs convictions spirituelles : les athées, les agnostiques, et les croyants ».

Henri Peña-Ruiz


TABLE DES MATIÈRES

AVANT-PROPOS

L’impasse

Reconnaissance académique

PARTIE I – LE DIAGNOSTIC

CHAPITRE 1 – Considérations préliminaires

1.1 Une histoire de valeurs et de bien commun

1.2 Les conditions gagnantes

1.3 Prédominance du phénomène religieux

1.4 Un État « tolérant » ou un État « laïque » ?

1.5 Interpénétration des extrêmes

1.6 Libéralisme politique

1.7 De la tolérance à la démission

1.8 Remise en question

CHAPITRE 2 – Gestion de la diversité

2.1 Le multiculturalisme, une religion séculière

2.1.1 Perspectives légales et constitutionnelles

2.1.2 Une vision politique binaire

2.1.3 Les dogmes du multiculturalisme politique

2.1.3 Dérives sociales

2.1.4 Dérives antidémocratiques

2.1.5 Pour l’avenir du débat

2.1.6 Conséquences politiques

2.2 L’interculturalisme, la voie du milieu

2.2.1 Pourquoi choisir l’interculturalisme ?

2.3 Des définitions

2.3.1 Critiques de l’interculturalisme

2.4 À la recherche des valeurs communes

2.4.1 L’intégration

2.4.2 Méthodologie

2.4.3 Recoupements des valeurs

2.4.4 Droits de la dignité humaine

2.4.5 La liberté de conscience

2.4.6 Égalité et justice

2.4.7 Libéralisme politique et démocratie

2.4.8 Les valeurs fondamentales de la Charte fédérale

2.4.9 Conclusion sur les valeurs communes

2.5 La question de l’identité

2.5.1 Le faux débat identitaire

2.5.2 La construction de l’identité commune

CHAPITRE 3 – Évolutions de la laïcité

3.1 Chez nous d’abord

3.1.1 Le réveil du Québec

3.1.2 Le débat qui a déraillé

3.1.3 Le projet de loi 60

3.2 La gestion des religions à l’étranger

3.2.1 Chez les Anglo-saxons

3.2.3 Histoire française

3.3 Critiques des deux archétypes exclusifs

3.3.1 Sécularismes comparés

3.3.2 Division ou mise en commun ?

3.3.3 La laïcité « ouverte »

3.3.4 Pouvoir de sanction et de coercition

CHAPITRE 4 – La Charte des droits, la clé de voûte

4.1 La vision de la Cour suprême

4.2 La liberté de religion

4.2.1 Conscience, croyances et religion

4.2.2 Une liberté de religion construite

4.2.3 La religion subjective

4.3 Des limites à la liberté ?

4.4 Une hiérarchie entre les droits et libertés ?

4.5 L’interprétation de la Charte

4.5.1 Limitations intrinsèques

4.5.2 Une première limitation intrinsèque

4.5.3 Le test « Oakes »

PARTIE II – LE MODÈLE DE VIGILANCE

CHAPITRE 5 – Équilibre des libertés

5.1 L’approche fondamentale

5.2 Les principes généraux

5.2.1 Qu’est-ce que la laïcité ?

5.2.2 La séparation entre églises et État

5.2.3 La neutralité de l’État

5.3 Le nouveau modèle

5.4. Une laïcité établie sur des valeurs

CHAPITRE 6 – L’espace public et l’espace étatique

6.1 L’exercice des droits et libertés dans l’espace public

6.2 Responsabilités laïques

6.3 Le pouvoir législatif

6.4 La laïcité en absence de l’État

6.4.1 Relations entre les citoyens

6.4.2 Licence de discriminer

6.4.3 Discrimination et égalité dans le privé

6.5 Discriminations interreligieuses

PARTIE III – LAÏCITÉ APPLIQUÉE

CHAPITRE 7 – Les vêtements et les signes religieux

7.1 Les signes religieux ostentatoires

7.1.1 La kippa

7.1.2 Le turban

7.1.3 Le voile, ce cas si particulier

CHAPITRE 8 – Les pratiques religieuses  dans la fonction publique

8.1 L’école laïque

8.1.1 Les droits des mineurs

8.1.2 L’école, un environnement si particulier

8.1.3 La liberté de religion des enfants

8.1.4 Enseigner et non endoctriner

8.2 Les écoles confessionnelles

8.3 Les collèges et les universités

8.4 Les soins de santé

8.5 La loi 62

8.6 Discrimination religieuse

8.6.1 À l’égard des personnes

8.6.2 À l’égard des fonctionnaires

8.6.3 À l’égard des groupes identifiables

CHAPITRE 9 – Considérations pour le futur

9.1 Le nouveau paysage

9.2 Défis à rencontrer

9.2.1 Un développement stratégique

9.2.2 Démentir les mensonges multiculturalistes

9.2.3 Proposer une vision claire de la laïcité

CONCLUSION POLITIQUE

ANNEXES

ANNEXE 1 – Ébauche de proclamation d’un régime de laïcité

Charte de la laïcité du Québec

ANNEXE 2 – Notes bibliographiques

AU SUJET DE L’AUTEUR

COMMUNIQUER AVEC L’AUTEUR


EXTRAIT

AVANT-PROPOS

L’impasse

Jusqu’ici, on a présenté aux Québécois deux modèles de laïcité manifestement contradictoires. Les deux ont conduit à des impasses. Pour l’archétype républicain, c’est l’aveuglement du Parti québécois qui l’a détruit en raison d’un projet de loi mal justifié, mal ficelé, incomplet et incohérent, sans parler de son incompétence crasse à le défendre. Intituler sa proposition « Charte des valeurs » présageait déjà du détournement de débat qui allait s’ensuivre. Au lieu de parler de laïcité, de ses principes fondamentaux et de ses objectifs, on a discuté du voile islamique. On l’a allègrement confondu avec la laïcisation, la neutralité, l’identité nationale, l’athéisme, le libertarisme, les caprices culturels, sans oublier, il va sans dire, sa grotesque réduction à un simple code vestimentaire. Les échanges ont vite pris l’allure d’une guerre religieuse. On a démonisé la laïcité en la dépeignant comme un répugnant culte « d’exclusion » recherchant tout simplement l’éviction de la religion de l’espace public ; ses partisans furent réduits à une secte d’adorateurs des esprits maléfiques de l’intolérance, de la xénophobie et de l’islamophobie. Les fanatismes se sont ainsi déchaînés dans leur mode binaire exclusif habituel. Tous n’ont pas été atteints ! Heureusement ! Mais, il y en a tellement eu !

Le pendant glorieux de la diabolique « laïcité républicaine » fut la triomphante « laïcité ouverte » dont les défenseurs, dissimulés sous les voiles de la liberté absolue de religion, n’osaient même pas seulement concevoir l’hypothèse d’un possible questionnement des communautarismes religieux ou des comportements de leurs croyants. Mais le tourbillon de son triomphe initial finira finalement par la mener, elle aussi, à la déchéance. Ce fut une mise à mort magistrale, celle de la « laïcité ouverte ». Elle a été exécutée froidement, méthodiquement, par une Cour suprême unanime qui a déboulonné un à un tous ses phantasmes de neutralité « légère », « ouverte », « inclusive » ou « patrimoniale », pour la laisser sans aucune assise juridique crédible. Après cette répudiation radicale, le Québec se retrouvait en fin de compte à court de modèles tout pensés d’avance. Les deux propositions avancées ont finalement été désavouées. La première par l’étourderie des politiciens, l’autre par la froide analyse des magistrats. Impasse ! Que faire ? Il ne nous reste qu’à nous relever les manches et nous dessiner un modèle bien à nous, à partir de ce qu’il y avait de meilleur dans les deux offres écartées : la liberté, l’égalité et le respect de la dignité humaine.

L’expérience nous a enseigné que les débats entourant la laïcité se résument la plupart du temps à un brassage des mêmes vieux clichés mal définis auxquels on attribue une valeur dogmatique, tout en faisant peu de cas de leur véritable signification. De trop nombreux intervenants ont facilement laissé voir leur maîtrise rudimentaire de ses concepts, de sa nature, de ses principes et de ses objectifs. Pour être vraiment sincère, il faut reconnaître qu’ils requièrent aussi un sérieux dépoussiérage après les campagnes de désinformation qui ont accompagné les initiatives des dernières décennies.

Jusqu’ici, le débat a été pratiqué à un niveau de superficialité intolérable. Il fallait tout revoir à partir des éléments les plus fondamentaux. Tous les postulats devaient être réévalués dans la perspective de la réalité québécoise contemporaine et non en fonction d’un idéal romantique ou d’une tradition mal arrimée aux exigences du 21e siècle. En anticipant une éventuelle reprise du débat, j’ai souhaité creuser le sujet pour lever les ambiguïtés entourant les concepts de la laïcité, de la séparation et de la neutralité de l’État, comme d’ailleurs celui de la liberté de religion. Cet essai présente les conclusions de cet exercice, dégageant, je l’espère, une base théorique propice à l’élaboration d’une compréhension plus affinée de la laïcité répondant mieux ainsi au défi multiculturel contemporain.

Historiquement, sauf de trop rares exceptions, presque tous les systèmes de convictions ont montré une inclination prononcée à dominer et à contrôler la société pour imposer leur vision. En Amérique du Nord, aujourd’hui, les grandes religions traditionnelles ont officiellement renoncé au cléricalisme, à l’exception d’une partie importante du mouvement évangélique américain. L’islam, par contre, ne l’a jamais répudié ; il fait toujours partie intégrante de sa vision politique. Ailleurs, dans certains pays d’Europe ou d’Amérique du Sud, le catholicisme défend encore avec ardeur le contrôle clérical qu’il exerce sur certaines sociétés. Il ne faut donc pas baisser la garde et cesser de s’opposer à cette vision antidémocratique du pouvoir politique qu’est le cléricalisme.

Nous pouvons faire mieux que les anciens modèles exclusifs extrémistes. Nous pouvons concevoir une laïcité fabriquant du commun plutôt que génératrice d’exclusions. C’est à cet objectif qui ne peut être réalisé sans compromis que se consacre cet essai.

Reconnaissance académique

N’étant qu’un penseur « amateur », ne bénéficiant pas de la bénédiction académique autorisant les pensées et les analyses méritoires, il me fallait souligner les multiples points d’ancrage subtilisés chez de nombreux auteurs que j’ai goulûment vampirisés. J’ai employé leurs mots selon mon bon plaisir pour faire avancer mon propos comme un grimpeur improvise son chemin dans la paroi en exploitant ses moindres anfractuosités ; la métaphore elle-même est adaptée de M. Maffesoli. De là, les nombreuses références mouchetant ce travail, en reconnaissance de la contribution de plusieurs auteurs, dont certains trouveront peut-être inappropriée l’intention imposée à leur texte. Au-delà de leur visée originale, ils ont influencé ma réflexion dans la direction exprimée.

« À l’encontre de ces rigides spécialistes, ayant une compréhension des choses de la vie bornée par des scrupules surannés, il vaut mieux rester, en son sens étymologique, un “amateur”. Ouvert à cette aventure qu’est la vie de l’esprit : tout comme la vie tout court. Aux demi-lettrés enclos dans leurs certitudes, préférer la sensibilité théorique sachant unir l’intelligence et le sens de l’expérience. »

(Maffesoli [a], p. 16)

De la philosophie, de la science politique, de la sociologie et du droit, l’auteur de ces lignes n’est ni un professionnel ni un expert, mais un indomptable et assidu amoureux de lecture et de réflexion. Il n’exprime aucune opinion professionnelle, seulement les conclusions personnelles d’un lecteur curieux. Ce travail revendique, pour le citoyen en questionnement, le droit de s’intéresser à des sujets spécialisés et d’en cueillir, comme « amateur », les résultats qui lui semblent s’imposer. Les énoncés de cet essai ne sont que ça : des réflexions d’amateur. Les corporations peuvent se conforter, elles garderont toujours leur pleine capacité d’exercice et d’expression. On connaît l’infaillibilité dont elles savent faire preuve dans leur pratique!

Cet essai suit la progression de l’analyse qui l’a précédé. La première partie explore les deux archétypes de laïcité avec une très brève revue historique, incluant un inventaire de leurs idées maîtresses, de leurs principes opérationnels et des problèmes liés à leur application. Ensuite, un chapitre s’attarde au contexte constitutionnel canadien en revoyant attentivement les décisions pertinentes de la Cour suprême. La seconde partie développe un modèle praticable dans le Québec contemporain et décrit ses valeurs et les conditions nécessaires à sa mise en œuvre. Finalement, la troisième partie traite de certaines situations particulières, de même que de quelques questions devant être prises en compte dans la délivrance du nouveau régime de laïcité anticipé.

AU SUJET DE L’AUTEUR

L’auteur est né à Québec, d’une famille modeste, en novembre 1948, ce qui en fait un baby-boomer de la première vague. Il entreprend des études classiques grâce à une initiative inédite de la Commission scolaire de Québec qui souhaitait favoriser l’accès à ce programme d’études de qualité, alors presque exclusivement réservé à une élite bien nantie. La création des cégeps, en 1966, bouscule ses plans originaux en lui permettant d’obtenir son DEC avec la première cohorte à sortir des collèges, en 1968. Il s’oriente d’abord vers des études en droit. Elles l’occupent pendant trois ans, mais la réévaluation de ses intérêts l’amène à revoir ses orientations. Son insatiable curiosité pour les sciences le ramène rapidement à des études dans ce domaine qui se termineront par l’obtention d’un doctorat en chimie, décerné par l’Université Laval en 1984. Il poursuit des études postdoctorales à Paris et à Ottawa, en plus d’occuper différents postes d’enseignement dans les universités de Paris XIII, de Détroit, d’Ottawa, ainsi qu’à l’Université du Québec à Montréal.

Son expérience universitaire lui donne l’occasion de s’intéresser à la prévention et à la mitigation des accidents impliquant des produits chimiques en milieu de travail. Il devient, en 1988, conseiller en réponse d’urgence à CANUTEC, le « Centre canadien d’urgence transport », de notoriété internationale. Sa familiarité avec les propriétés des produits chimiques et leurs interactions est souvent mise à profit au cours de ses interventions dans des centaines d’accidents de marchandises dangereuses, sur les routes, sur les rails, dans le transport aérien et maritime. Il fut aussi amené à contribuer de manière importante à la rédaction du « Guide des premières mesures d’urgence 1992 », pour lequel le collectif d’auteurs s’est vu attribuer le « Canadian Best-Seller Awards », pour ses 125 000 copies vendues. Ce travail de référence fut plus tard entériné officiellement par l’ALENA pour normaliser, à la grandeur du continent, ses recommandations de réponses aux accidents de marchandises dangereuses.

C’est alors que la Garde côtière canadienne lui demande de prendre en charge le développement de son programme de réponse aux accidents chimiques maritimes. Il a alors l’opportunité de collaborer aux travaux de plusieurs comités techniques internationaux sous l’égide de l’Organisation maritime internationale. Il a ainsi été appelé à présider les activités du comité de rédaction de son « Manual on Chemical Pollution – Section 1 ». En 1998, la Direction générale du transport des marchandises dangereuses, à Transport Canada, lui confie la direction des affaires réglementaires, le groupe responsable de concevoir les amendements aux règlements et à la législation, ainsi que de délivrer les permis prévus à la Loi sur le transport des marchandises dangereuses. Ses responsabilités incluaient en plus la conception des normes réglementaires de fabrication et d’utilisation des conte­nants utilisés pour le transport des marchandises dangereuses. Il restera à ce poste jusqu’à sa retraite de la fonction publique fédérale en 2011.

Membre du mouvement laïque québécois et de l’Association humaniste du Québec, il est intervenu dans le débat entourant le projet de loi 60 du Parti québécois, pour y défendre la conception républicaine de la laïcité.


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Adresse électronique : laicitedevoilee@gmail.com


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